Pionnier et grand spécialiste de l'imagerie numérique,
J-F Colonna recevait en 1986 à Tokyo le prix "Artistic and technical
excellence award", et il publiait avec Marie Farge dans le numéro
d'avril 1987 de "la recherche": "L'expérimentation numérique
par ordinateur" dont nous citons quelques extraits.
"L'intérêt du numérique est d'ouvrir de nouveaux
champs d'expérimentation.
Les images obtenues en visualisant les résultats d'expériences
numériques vont permettre de présenter les résultats,
non plus comme une suite de chiffres, mais de façon globale,
sous forme de courbes ou de tâches. L'idée de faire des
facultés de reconnaissance de l'oeil le principal outil d'aide
à l'analyse des données ou des résultats de calcul
semble naturelle. L'esprit humain qui procède par images mentales
demande des images "externes" pour être stimulé, confronté
à de nouveaux problèmes, mené sur la voie de nouvelles
découvertes et solutions.
Ces images numériques sont plus que de simples intermédiaires
entre le chercheur et son modèle: en stimulant les fonctions
associatives du cerveau, elles peuvent même devenir les vecteurs
de découvertes. Ces formes qui naissent sous l'oeil de l'observateur
, et qui traduisent un ordre sous-jacent contenu de façon implicite
dans les équations révèlent parfois un phénomène
inattendu ou bien indiquent la direction à suivre pour attaquer
un problème ouvert. (...)
Il s'agit alors d'une véritable exploration réalisée
sur ces images et pouvant aboutir à des découvertes visuelles,
faites à partir de formes, parfois nouvelles, voire même
inimaginables. Fait aussi important, ces images nous permettent de voir
et d'observer ce que jusqu'alors aucun instrument optique ne nous avait
montré.
Grâce à l'ordinateur différents domaines scientifiques
parmi les plus inaccessibles et les plus abstraits, en particulier certaines
branches des mathématiques et de la physique théorique,
acquièrent aujourd'hui un caractère plus expérimental.
Il y a un siècle déjà Heinrich Hertz faisait remarquer
que: "on ne peut échapper au sentiment que ces formules mathématiques
ont une existence qui leur est propre, qu'elles sont plus savantes que
ceux qui les ont découvertes, que nous pouvons en extraire plus
de science qu'il n'en a été mis à l'origine."
JEAN-FRANCOIS COLONNA :
"l'expérimentation numérique par ordinateur"
"La
Recherche"-avril 1987
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